Assis, là, face à la mer...
Juste les yeux... Regarder l'horizon, la barre des vagues formant comme des dunes mouvantes, vivantes. Contempler, sans en rien penser, les mouettes qui plongent, les nuages au large, presque violets à force d'être gris. Poser mon regard sur le lisse du sable. Observer le ressac, voir la bouée rouge qui marque le chenal s'agiter à son rythme...
Fermer les yeux...
Puis, juste l’ouïe... Et prêter attention au son des vagues, sentir siffler le vent à mes oreilles, identifier le moteur du petit avion dans le lointain, entendre les mouettes, prendre conscience du bruit des pas de ce promeneur qui passe à quelques mètres, faisant crisser ses semelles...
Et encore, juste le corps... Sentir bouger mes cheveux, être conscient du poids de mes fessiers sur le sable. Porter ma pensée sur les parties du corps, l'une après l'autre. Sentir le soleil sur mon visage...
Et, juste le nez... Sentir, oui, vraiment, tournant la tête à droite, la senteur un peu poivrée de ce parfum d'iode, le laisser entrer dans mes narines. Puis à gauche à présent et saisir au vol une effluve chaude des genêts ensoleillés, porteuse de résine de pin, venant de la dune en arrière...
Juste la bouche... Goûter, sur mes lèvres, le sel des embruns...
Puis rouvrir les paupières. Et embrasser, d'un seul ensemble, voir, entendre, sentir, goûter. Absorber le paysage, comme le dévorer de tous mes sens à la fois, pour mieux m'en imprégner encore.
Et seulement, là, laisser l'émotion m'étreindre, me gagner ; l'accueillir, la remercier de venir de cette si lointaine profondeur en moi, une joie infinie de reconnaissance de tant de beauté, l'évocation de si chers souvenirs, et cette promesse de si précieux à venir...